Une photo de cellule de prison comme carte postale d’Angers

Dans leur jargon, les prisonniers appellent ça « une grotte ». Voilà ci-dessous la photo d’une cellule de la maison d’arrêt d’Angers. Selon les ailes où elles sont situées, certaines sont en meilleur état, mais il paraît que la plupart ressemble à celle-ci. Des personnes y vivent des mois, voire des années, le plus souvent à deux, mais parfois à trois par cellule. Et pire que la saleté, l’humidité, la vétusté et la promiscuité, cette photo ne montre pas ce que tous les pensionnaires de la prison d’Angers dénoncent en premier lieu, à savoir les cafards qui courent la nuit sur les couvertures, et la chaleur suffocante due à l’impossibilité d’aérer. Et on ne parle pas de l’odeur … les bombes aérosols étant au passage interdites pour des raisons de sécurité.
C’est dans une cellule comme celle-ci qu’un prévenu s’est pendu, seul, dans la nuit du 5 au 6 juillet dernier. L’enquête concernant son décès est toujours en cours.
Cette photo n’est pas volée. Elle est extraite du rapport d’expertise sollicité par les avocats du Syndicat des avocats
de France (SAF), dans le cadre de quatre procédures en cours devant le tribunal administratif de Nantes. Elle est publiée avec l’accord de ces avocats.
Le rapport contient des dizaines de photos comme celle-ci, parfois plus édifiantes encore (on épargnera à nos lecteurs les photos des sanitaires…). Mais outre le mot « saleté », qui apparaît à toutes les pages, il contient aussi des données chiffrées sur la surface des cellules, la température, la luminosité, le bruit, l’humidité…

Aucune des cellules ne fait les 11 m² pourtant rendus obligatoires par la loi elle-même. L’expert a calculé que la surface de mobilité (hors meuble) de chaque cellule est de 4 m², bien sûr à diviser par le nombre d’occupants.
Sur la base de cet épais document, les avocats du SAF vont tenter d’engager la responsabilité de l’État pour que soit admis par la Justice le principe de détention indigne, et pour demander des indemnités au nom de certains de leurs clients qui ont été détenus à Angers. Personne ne se fait d’illusion sur la hauteur des sommes qui pourraient être demandées, mais c’est la condamnation de principe qu’espèrent les avocats. Cette procédure intervient bien sûr pour montrer toute l’urgence qu’il y a à construire un nouvel établissement pénitentiaire.

Mais cette nouvelle prison est à la fois espérée et redoutée par les défenseurs, d’abord sur la question de sa localisation. «Il est essentiel qu’elle soit construite à proximité des familles et des conseils, insiste Me Christelle Magescas, la présidente du SAF-49. Cette proximité est essentielle pour la sociabilisation du détenu, c’est-à-dire sa réinsertion et la prévention de la récidive ».

Les avocats estiment également que la construction de nouveaux établissements ne résoudra pas le problème de la surpopulation carcérale, du fait du durcissement des lois pénales. Ils craignent également la « déshumanisation » des nouvelles structures pénitentiaires, en accord sur ce point avec les syndicats de surveillants. « Les conditions de détention de nos clients sont aussi leurs conditions de travail ».

Jean-Yves Lignel
Courrier de l’Ouest du 29 juillet 2010

Il a ENFIN été décidé en ce mois d’octobre 2014, de construire la nouvelle prison à Trélazé, livraison possible vers 2018 ?

Photos d’une des 3 galeries de la Maison d’Arrêt d’Angers et d’une cellule

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